Le maire détient un devoir de police administrative, il est chargé de maintenir l’ordre public, défini dans le Code général des collectivités territoriales comme le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Il s’agit également de polices spéciales (baignade, circulation…) qui comme les citoyens auraient tendance à l’ignorer dépendent directement de la commune.
Pourquoi La Baule accentue la vidéo dans l’espace public ? Comment se répartissent les coûts engendrés par la mise en place de ces caméras ? Quelles sont les limites du système pour ne pas enfreindre le droit à la vie privée et les libertés individuelles ?
Si les caméras déjà implantées à La Baule marquent une baisse des délits, pas loin de 30 % depuis 2007, c’est surtout dans un souci de prévention comme le souligne Philippe Langlois, Maire adjoint en charge de la sécurité et de la circulation, qu’Yves Métaireau et son équipe ont choisi de renforcer le dispositif de « vidéo protection ».
Pour l’heure, il y a deux caméras prévues, avenue du Bois Robin, non loin de l’aérodrome, une avenue des Ifs proche de l’avenue De Gaulle, une avenue Joyeuse perpendiculaire à celle du Maréchal de Lattre de Tassigny et une avenue de Rosières. A noter que les trois dernières sont équipées de lecture de plaque minéralogique.
Un budget de 100 000 € par an est alloué au remplacement des caméras et à l’implantation de nouvelles. Aujourd’hui, c’est 200 000 € d’investissement, regroupant les exercices des années 2010 et 2011, qui vont être utilisés pour le quadrillage de la commune.
Si les caméras tendent à faire baisser les délits en brisant l’anonymat, Philipe Langlois précise que La Baule a renforcé de 30 % sa police municipale en 3 ans. En juin 2010, une étude de Cap Atlantique notait une baisse de la délinquance de 56 % en 2007 et 45 % en 2009, notant comme Erwan Le Moigne (élu de l’opposition à La Baule), que la police municipale est une police efficace.
Dans le cadre de sa politique de sécurité publique et avec la conviction de servir l’intérêt général, la municipalité a décidé de faire évoluer et d’améliorer son système existant pour faire de la prévention, répondre à la réforme générale des politiques publiques qui renforce le rôle des maires, et surtout lutter contre l’alcoolisme massif qui, dans une ville comme La Baule, représente plus de la moitié des interventions des services de police et de secours. (300 interventions en un an dont 180 pour ivresse publique et manifeste.)
Un dispositif subventionné par l’Etat à hauteur de 20 à 50 %, permettant de passer des conventions entre l’Etat et les collectivités territoriales, qui répond selon les porteurs du projet au sentiment d’insécurité des habitants et des commerçants. Une stratégie qui devient une interface entre la politique et la tactique. La stratégie générale prenant en compte la finalité politique - la satisfaction des votants pour une réélection - et la stratégie opérationnelle traduit d'une manière concrète sur le terrain. La « vidéo protection » est utilisée selon Philippe Langlois comme une économie de moyens, un outil complémentaire.
Un renforcement de la sécurité à La Baule qui ne satisfait pas pour autant l’opposition de Gauche comme le souligne Erwan Le Moigne qui craint les dérives et atteinte à la vie privée des personnes.
L’opposition dénonce tout d’abord un glissement sémantique volontaire et un risque idéologique. Dans la lignée de la loi LOOPSI 2, l’extension des dispositifs de « vidéosurveillance » augmente le contrôle et la privatisation de l’espace public. A travers cette dynamique, la rue devient le lieu d’un éventuel délit et non plus un espace de liberté propre à la rencontre et à l’échange. On parle de risque idéologique, car aujourd’hui on souhaiterait se baser sur un système de preuves scientifiques sans considérer qu’elles peuvent être faillibles. Erwan Le Moigne dénonce la mise en place d’un système liberticide, soutenu par la politique gouvernementale, qui casse le lien social et tend à aggraver les sanctions de façon subjective.
Un principe républicain de sûreté nationale, une mission de service public qui glisse vers la sécurité individuelle et cultive la victimisation des personnes. Parallèlement au climat de défiance des magistrats, on renforce avec plus de sévérité le système sécuritaire. On s’en sert au profit d’une politique qui vise à installer à terme des jurys populaires pour l’application des peines.
Preuve de ces dérives, La Cour des Comptes a épinglé la politique de sécurité initiée par Nicolas Sarkozy dont la « vidéosurveillance » ou « vidéo protection » est un axe central. On y apprend par exemple que certains préfets s’autorisent à violer des lois relatives aux libertés individuelles alors qu’ils sont eux-mêmes les garants de ces libertés.
Rapport disponible ici :
http://www.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20110707/1545747_3260_rpt_securite_publique_definitif.pdf
Une politique qui selon l’opposition, et malgré les nombreuses études (Cour des Comptes, Scotland Yard 2008…) reste inefficace car elle ne fait que déplacer le problème de la délinquance, accentuer le manque de formation des policiers face à l’image numérique, diminuer les effectifs de police nationale et surtout souligner le désengagement de l’Etat qui oblige les communes à prendre en charge le coût de ce matériel ainsi que son installation au profit de la police nationale. On déleste un coût qui relève de l’Etat. Pire, on constate que plus de la moitié des crédits du Fonds Interministériel de Prévention de la Délinquance va désormais à ce poste budgétaire, diminuant de fait le financement de structures éducatives ou d’aides aux victimes. Parallèlement à ses investissements de matériel, La Baule a voté une aide de 6 000 € d’aide aux victimes pour 2011.
Si la « vidéosurveillance » aujourd’hui est initiée par des politiques sécuritaires, la Cour européenne et le législateur restent les remparts des libertés fondamentales, notamment contre le fichage des données.
Aujourd’hui, le délai légal de conservation des données est de 7 jours. Pendant 7 jours, un procureur peut demander les bandes d’enregistrement des données, notamment pour lutter contre de la petite délinquance. On compte environ 10 demandes par an pour le Parquet de St Nazaire, preuve en est de l’écart considérable entre l’investissement financier et l’utilisation pratique du dispositif en terme de droit.
Aujourd’hui, toutes les infractions peuvent être fichées sauf les infractions financières. Au moment d’une interpellation, n’importe quelle personne peut être soumise au prélèvement ADN. Le refus même du prélèvement ADN, qui relève de la liberté individuelle et de la présomption d’innocence, est un délit passible d’un an de prison.
Renforçant un mouvement sécuritaire ainsi que la rhétorique « d’être sur le terrain » souvent utilisée comme gage de crédibilité dans le débat public, que se passera-t-il quand la « vidéosurveillance » prouvera de manière scientifique un refus d’obtempérer qui relève des droits de l’Homme ?
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