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Isabelle Autissier aime surprendre

Navigatrice, écologiste, écrivain, Isabelle Autissier a plus d’une corde à son arc. De passage à La Baule pour les Rendez-vous d’Atlantia, elle ne mâche pas ses mots. Rencontre.

Quels sont vos meilleurs souvenirs de voile ?
« Il y en a 312 000 ! Ce sont des souvenirs de gamine comme la première fois que j’ai vu neiger en mer. J’ai trouvé ça très beau et je me suis dit que quand je serais grande je ferais du bateau. Le souvenir d’être à ma place, là où il faut, avoir une certaine harmonie avec l’environnement quand il faut, que ce soit en course ou en croisière. Je suis chez moi quand je suis en bateau, donc il y a plein de bons souvenirs ! »

Que pensez-vous de la compétition aujourd’hui ?
« La compétition, c’est devenu un métier. Ça fait partie du barnum ambiant et c’est bien. Les gens aiment ça et suivent plus ou moins ; ça les fait rêver, imaginer des endroits. Je pense que les gens retiennent plus le voyage que la compétition ».

Pourquoi vous êtes-vous engagée dans le World Wide Fund for nature ?
« Je ne suis pas une écolo de la dernière heure. J’ai fait une formation ingénieur agronome, j’ai travaillé dans la pêche. Il y a trente ans, je travaillais avec les marins pêcheurs et je voyais bien qu’ils allaient dans le mur. C’est quasiment impossible à dire, car on se fait jeter dans le port ! C’est en train de mal finir, malheureusement car c’est un beau métier.
« Il y a dix ans, j’ai eu un peu moins de travail puisque j’ai arrêté la compétition. J’ai fait beaucoup de choses et décidé de faire la seule chose raisonnable à faire : m’occuper de la planète et donc m’engager plus sérieusement dans cette voie-là. WWF me convient bien dans son positionnement ».

À propos des marins pêcheurs, vous voyez des solutions ou c’est quelque chose d’inévitable ?
« Les solutions, on les avait sous la main et pour pas cher il y a vingt ans. On n'en a pas voulu. Il y a dix ans, elles étaient déjà un peu plus compliquées et un peu plus cher. On n'en a pas voulu non plus. Aujourd’hui, elles sont compliquées et carrément chères. On n'a pas d’autre solutions que de laisser du repos biologique pour certaines espèces. On a beaucoup trop de capacité de pêche par rapport à ce que la mer peut fournir. Le poisson c’est sauvage, c’est un prélèvement qu’on fait dans la nature. Si on commence à prélever plus que les intérêts, on tape dans le capital. et quand on tape dans le capital, au bout d’un moment c’est fini. On est sur cette pente-là : entre 75 et 80 % des espèces sont surexploitées ou à la limite de la surexploitation. Il faut absolument ralentir pour laisser souffler la nature et qu’elle remette les espèces à notre disposition. Il faudrait entre les deux, trouver des aménagements financiers pour faire en sorte que la pêche industrielle, la moins pourvoyeuse d’emplois, soit limitée ; et qu’a la pêche artisanale on propose des activités maritimes qui pourraient être des compléments à la diminution des pêches comme la recherche, travailler comme garde-pêche ou encore le tourisme. On pourrait trouver des solutions pour garder des pêcheurs, ce que je souhaite foncièrement. Et qu’ils continuent à vivre. Si on ne le fait pas maintenant, la pêche s’arrêtera car il n’y aura plus de poissons. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’ONU*. Essayons d’être un peu intelligents et d’en laisser quelques-uns pour continuer à les pêcher ».

Pourquoi avoir commencé à écrire ?
« Je ne suis pas de l’univers de l’image, de la télévision. Je suis un dinosaure : quand j’étais petit, et il n’y avait pas la télévision, heureusement. Nous pouvions continuer à rêver, à imaginer des choses avec notre tête, en particulier grâce à la lecture. J’ai toujours été lectrice. La lecture m’a fait imaginer beaucoup de choses. L’imagination permet de se motiver après, pour réaliser plein de choses. Ça me paraît être un bon moyen de transmissions des idées et des émotions. Assez logiquement, quand j’ai eu envie de transmettre ce que j’ai vécu, je l’ai fait naturellement par l’écriture ».

Comment s’est passée la transition au roman ?
« C’est la curiosité intellectuelle. J’aime bien aller voir là où je ne suis pas attendue, je n’ai pas trop envie d’être dans une boîte. C’est un exercice qui m’a intéressée, je me suis dit que j’allais essayer ».

D’où est venue l’idée de votre roman L’amant de Patagonie ?

« Ça fait huit ans que j’ai un bateau là-bas, j’y navigue quasiment trois mois par an. Je les aime beaucoup, je les trouve intéressants, enrichissants, ils nous obligent à réfléchir. On croise des gens pas comme ailleurs parce que ces lieux sont particuliers, forts. J’avais envie de parler de cet endroit et aussi de la rencontre entre blanc et indiens car c’est un thème très actuel, l’autre qui est différent, qu’on n'accepte pas ».

Que pensez-vous de l’entrée de la baie de La Baule au club des plus belles baies du monde ?
« Je pense que c’est usurpé. Pour moi, un front de mer bordé d’immeubles, ça ne me paraît pas être la plus belle baie du monde. J’aurais aimé qu’on laisse respirer un peu de nature. La beauté, ce n’est pas ça, car il n’y a pas d’harmonie. C’est une ville très propre, mais moi ça ne me touche pas du tout ».


*Selon le rapport Green Economy publié par l’ONU en 2010, il n’y aurait plus de poisson dans les océans d’ici 2050 si la pêche continue comme elle est aujourd’hui.
 

Auteur : AP | 12/07/2012 | 0 commentaire
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